Ces dernières années, plusieurs nations africaines ont pris des mesures importantes pour affirmer leur souveraineté et redéfinir leurs relations avec les anciennes puissances coloniales. Le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont récemment demandé le retrait des forces françaises, exprimant ainsi leur volonté de se libérer d’une tutelle militaire étrangère perçue comme un vestige du colonialisme. Cette tendance reflète une Afrique en quête d’autonomie et de nouvelles alliances stratégiques, remettant en question le rôle traditionnel de la France sur le continent.
Dans ce contexte de changements géopolitiques, le Gabon, un pays d’Afrique centrale, est en train de redéfinir ses relations avec la France. Le 9 juillet, une école d’administration militaire a été inaugurée dans la base française de Libreville, symbolisant un prétendu « nouveau partenariat » entre les deux nations. Cependant, au-delà des discours officiels, cette initiative soulève des questions importantes pour l’avenir du Gabon et des relations franco-africaines.
Cette évolution, présentée comme un progrès dans la coopération bilatérale, peut être interprétée de différentes manières du point de vue gabonais et africain. D’un côté, la transformation de la base militaire française en un centre de formation pourrait offrir des opportunités de développement des compétences locales. D’un autre côté, cela pourrait être perçu comme une tentative de la France de maintenir son influence de manière plus subtile, sans pour autant renoncer à sa présence au Gabon.
La base de Gaulle à Libreville, l’une des dernières bases militaires françaises en Afrique, verra ses effectifs réduits de 350 à 200 soldats d’ici 2025. Cette réduction, bien que significative, soulève la question de la nécessité d’une présence militaire étrangère permanente en Afrique. Les autorités gabonaises, dirigées par le général Brice Oligui Nguema, président de la transition arrivé au pouvoir en août 2023, sont confrontées au défi de concilier le besoin de formation militaire et la préservation de l’indépendance nationale.
L’établissement d’une Académie de protection de l’environnement et des ressources naturelles sur le site témoigne d’une prise en compte des enjeux spécifiques au continent. Cependant, il est légitime de se demander si de telles initiatives ne pourraient pas être entièrement dirigées et développées par des experts africains, renforçant ainsi l’autonomie et l’expertise locale.
Le général Jean Martin Ossima Ndong, secrétaire général du ministère de la défense nationale gabonais, a souligné l’importance d’adapter le partenariat avec la France « au contexte du jour ». Cette déclaration reflète une prise de conscience des changements en cours en Afrique et de la nécessité pour les nations africaines de redéfinir leurs alliances internationales selon leurs propres termes.
Pour le Gabon, comme pour d’autres nations africaines, le défi est de trouver un équilibre entre les partenariats internationaux et la préservation de la souveraineté nationale tout en développant ses propres capacités. La transformation de la base française en un centre de formation mixte pourrait être un premier pas dans cette direction, mais il est important de ne pas perdre de vue la nécessité d’un développement militaire et stratégique véritablement indépendant.
Cette évolution au Gabon s’inscrit dans un mouvement plus large de réaffirmation de l’identité et des intérêts africains sur la scène internationale. Alors que certains pays ont opté pour une rupture radicale avec l’ancienne puissance coloniale, d’autres, comme le Gabon, semblent privilégier une approche plus progressive. Cependant, l’objectif demeure le même : établir des partenariats équitables qui respectent pleinement la souveraineté africaine.
L’avenir dira si cette nouvelle forme de coopération avec la France répond effectivement aux aspirations du peuple gabonais et aux intérêts à long terme du pays. Pour l’instant, cela semble être une tentative de concilier le besoin de formation militaire avec une volonté croissante d’indépendance. Le défi pour le Gabon, et pour l’Afrique dans son ensemble, sera de veiller à ce que ces partenariats contribuent réellement au développement autonome du continent, sans perpétuer des relations de dépendance sous de nouvelles formes.
Cette évolution de la présence militaire française au Gabon ne représente qu’un chapitre dans le récit plus vaste de la redéfinition des relations internationales de l’Afrique. Elle illustre la complexité des défis auxquels sont confrontées les nations africaines dans leur quête d’une véritable indépendance stratégique et militaire, tout en naviguant dans un monde de plus en plus multipolaire.